Transformation numérique

Désormais omniprésent dans les pratiques des professionnels, et notamment des indépendants, le numérique entraîne une professionnalisation croissante et rapide des outils de la personne : on exigeait naguère que le collaborateur indépendant ait le permis B et la voiture ; On exigera bientôt de lui qu’il soit capable de se connecter depuis son domicile ou son espace de coworking en mode sécurisé, d’archiver ses données en protégeant la confidentialité, de certifier son identité…

Beaucoup d’entrepreneurs seront désarmés face à de telles demandes, et nous avons aujourd’hui la conviction que le décalage entre indépendants équipés et indépendants dépourvus d’équipement pourrait préfigurer une nouvelle fracture sociale dans le monde du travail de demain, particulièrement aigüe. Comment prévenir, ou à défaut réduire cette fracture ?

Exception faite de ceux ayant fait du numérique leur métier principal, les entrepreneurs exerçant leur activité en coopératives d’activité et d’emploi (CAE) ne feront pas exception et seront fortement exposés à cette fracture entrepreneuriale. Dans cet environnement complexe, les CAE constituent aujourd’hui des initiatives innovantes pour accompagner les indépendants, et plus largement outiller les mutations du travail, dans le sens d’une plus grande protection collective.

Les CAE, une formidable opportunité, à digitaliser

Les CAE jouent déjà un rôle de simplification et de sécurisation administrative. Le porteur de projet est créateur de son activité mais c’est en tant que salarié de la coopérative qu’il exerce. En véritable entrepreneur, il prospecte sa clientèle et finance sur son chiffre d’affaires, son salaire, ses charges sociales et sa participation aux fonctions mutualisées de la coopérative. Comme tout salarié, il bénéficie d’un contrat de travail à durée indéterminée (Contrat d’entrepreneur salarié associé) et d’une protection sociale complète. C’est la CAE qui facture ses ventes, encaisse les règlements et porte la responsabilité juridique de tous ses actes professionnels. S’il abandonne son projet, la CAE lui aura permis de le tester et d’acquérir des droits sociaux.

L’environnement des CAE est exposé à des changements systémiques, avancés ou déjà engagés, que le numérique outille : transformations du travail et des organisations, de l’emploi et de la valeur de la formation et de la connaissance, transformations de l’action publique, notamment du rôle de l’Etat et des acteurs institutionnels, transformations des territoires, transformations des modèles économiques.

Les CAE sont exposées à la raréfaction des financements publics, aujourd’hui importants dans leurs ressources, et se doivent de repenser leur mode d’organisation et de production, de façon à pouvoir relever notamment le défi d’une demande prévisionnelle exponentielle.

Les CAE n’accueillent guère plus de 10 000 personnes et reconnaissent pour certaines avoir atteint un seuil au-delà duquel la qualité de vie au travail des équipes d’appui et la qualité d’accompagnement s’en ressentira.

Le numérique pourrait permettre de mutualiser des moyens humains consacrés à la gestion, afin de concentrer les coûts salariaux sur l’accompagnement, qui est leur proposition de valeur principale.

Des enjeux d’outillage et de formation

A partir de 2015, le réseau Coopérer pour Entreprendre a initié une réflexion stratégique autour du numérique en vue de parvenir à une feuille de route. Les séminaires de travail organisés ont révélé des enjeux d’outillage et de formation pour les CAE.

Nombre de contributeurs ont fait part de leur inquiétude concernant le numérique, nombreux formulant l’idée que le numérique était un “impensé” que les outils de travail des CAE étaient “en retard”, et peut-être leurs méthodes également.

A cette impression d’ensemble s’ajoutait une inquiétude générationnelle : les gérants de CAE et leurs équipes se sentent, pour certains, dépassés face aux pratiques numériques et à l’arrivée de nouvelles générations “entièrement numériques”, et placés dans une difficulté certaine à transmettre des savoirs, ne les ayant pas acquis.

La transformation numérique illustrée

Face à ces constats, Coopérer pour Entreprendre a travaillé à diverses solutions qui se sont formalisées autour de projets :

La plateforme numérique interne TILT : conception d’une plateforme permettant la capitalisation, la mise en relation et l’innovation entre les différentes échelles et acteurs du réseau, du local au national : entrepreneurs, salariés, équipes d’appui.

Le Campus Numérique des CAE : une démarche de conduite du changement impulsée par Coopérer pour Entreprendre qui vise à professionnaliser les pratiques et les usages autour du numérique, tout en interrogeant l’impact du numérique sur les conditions de travail dans les CAE, et plus largement chez les indépendants. Ce projet a été retenu par le Transformateur numérique, qui fait partie du plan NET « Numérique Emploi Travail » lancé en 2016 par le Ministère du Travail.

Sous la marque enDI-form, Coopérer Pour Entreprendre a distribué auprès des CAE du réseau les solutions de formations à distance de Tree Learning. Cette plateforme a permis de concevoir et de livrer des formations à distance (e-learning, MOOC, classe virtuelle).

La marketplace : une place de marché coopérative pour les entrepreneurs-salariés de Coopérer pour Entreprendre, voire proposée plus largement aux travailleurs indépendants.


La stratégie de transformation numérique de CPE a été soutenue par la Fondation Crédit coopératif.